Ne pas rire (se moquer), ne pas déplorer, ne pas détester mais comprendre (Spinoza)
13 Octobre 2025
/image%2F2064230%2F20251013%2Fob_0e428d_rabbine.jpg)
« L’antisémitisme c’est le problème des non-juifs » disait Leibowitz. Cette allégation du philosophe anticonformiste israélien s’oppose à celle du Président Macron « L'antisémitisme ne doit pas être uniquement le problème des juifs, c'est d'abord le problème de la République » qui ont en commun de ne pas dire de quoi cet antisémitisme retourne. En conséquence les gouvernements français et allemands ne sauront pas promulguer de lois contre ce qui leur a semblé relever d’un substantif idéologique (1).
La formule absconse de Leibowitz reprise par la rabbine Horvilleur reste à creuser par ses destinataires « non-juifs ». Quel sens ses répétiteurs entendent ils lui donner ? Son corollaire pourrait laisser croire que l'antisémitisme n'est pas le problème des juifs. D’autres suppositions en découleraient, serait-ce :
L’introspection sans complaisance de Roger Domergue conduit à une autre conclusion « l’antisémitisme n’est pas dans l’antisémite mais dans le juif ».
/image%2F2064230%2F20251013%2Fob_679df2_images.jpg)
Cet aphorisme récent ramène toujours à cet antisémitisme protéiforme qui serait ancien et qui s’applique au juif indéfini par les juifs dira la rabbine Horvilleur. Alors comment l’antisémitisme peut-il s’exprimer par un accusé indéfini à l’encontre de quelqu’un dont on ne dit pas qui il est ? A moins que les promoteurs de l’antisémitisme n’y tiennent pas, ce déterminant limiterait le champ de la couverture qu’il procure comme l’explique l’ancienne ministre de l’éducation israélienne Shulamit Aloni l’antisémitisme victimaire est une « ruse » avec des nuances selon celui à qui il s’adresse avec une généralité, « éviter la critique d’Israël » dit-elle.
Indéfini donc, ce sempiternel tabou resterait sibyllin pour les juifs aussi. Delphine Horvilleur, la médiatique rabbine française du Mouvement Juif Libéral de France (MJLF) s’est risquée à en parler. Elle jugeait de « la solitude des juifs de France face à l'explosion des actes antisémites » (8/11/2023). Capable d’en dire beaucoup, elle dissimule mal son inconfort en ne disant de l’antisémitisme que ce qu’elle croit qu’en pensent les autres, au motif que « Ce n’est pas à la victime de justifier ou rationaliser ce dont elle est victime ». Un médecin pourrait-il soigner ce dont un malade ne dirait rien ?
Horvilleur réfute la définition de Malraux ; « le juif n'est juif qu'à travers le regard de l'autre et dans son cœur il n'y a rien d'autre.. Le Juif est un homme que les autres hommes tiennent pour juif », malgré ses déclarations ci-après concernant l’antisémitisme qui corroborent pourtant celle de Malraux.
Dans ce dédale d’opinions, la rabbine Horvilleur décline au gré de ses déclarations un antisémitisme variable ; florilège…
Avec ses interventions disparates jusqu’à la contradiction, Horvilleur abonde le proverbe de Rabelais « Qui trop embrasse mal étreint ; il est fort peu chrétien d’envier le prochain, de convoiter son bien », dont la fin exonère les chrétiens d’une autre de ses accusations ;
Alors avec autant de circonlocutions, qui est antisémite ? Qui est son ennemi ? Craint-elle une solitude encore plus grande en le désignant ? Autant de plaidoiries sans accusé ne produisent pas de coupables.
Ses reproches envers la nation voudraient que son pays s’oppose aux agents de cet antisémitisme multiple, un moyen d’obtenir de lui qu’il se range derrière sa communauté. Mais en France une discrimination même positive serait contraire aux institutions, les citoyens sont libres et égaux « … Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune » (Déclaration des Droits de l’Homme). L’Etat n’est pas autorisé à arbitrer les différents communautaires seulement pour le maintien de l’ordre, comme les empereurs romains dans leurs colonies (Ponce-Pilate).
Horvilleur sait sa communauté divisée sur le sens et la finalité recherchée quant à l’utilisation répétée de l’antisémitisme. Opiniâtre elle a fait sien le leitmotiv du mouvement Judaïsme en Mouvement… « Communiquer c’est exister. Exister c’est insister. Communiquer, c’est répéter le même message, comme on tape sur un clou. »
Ses tentatives sont regardées ici avec ses propres mots au gré de ses interventions publiques tiraillées entre son appartenance communautaire, la liberté d’expression de son pays et son for intérieur. L’exercice est difficile pour elle entre une subordination au conformisme philosophique traditionnel juif de certains qui réfutent le mode de pensée des non-juifs parce que conduisant à l’hérésie - « le même degré de nature entre l’homme et la femme c’est quelque chose importé du christianisme et de l’Occident qui est une destruction du féminin et du masculin » dit son confrère rabbin Sadin - et son pays laïc qui vénère la liberté de penser, la raison et l’égalité homme-femme,.
Est-il antisémite de contredire son confrère Sadin ?
Reste que les actes antisémites progressent dans un pays qui ne l’est pas (2). Aussi parler toujours des conséquences sans en dire clairement les causes ne permet pas d’en juger.
La rabbine Horvilleur s’y était essayée avec « l'antisémitisme ce n'est pas le problème des juifs mais de ceux qui le tolèrent ». Invitée par Alexandra Bensaïd à propos de son livre (2019) « Réflexions sur la question antisémite" Horvilleur ne sortait pas de son carcan accusatoire. Extraits.
Delphine Horvilleur : "L'antisémitisme n'est pas le problème des juifs mais d'une nation" et rappelle l’assassinat des enfants juifs par Merah « je ne comprends pas pourquoi la France entière n’était pas dans la rue ? » (NDA. Horvilleur était-elle dans la rue lors de l’assassinat des chrétiens dans leur église à Nice, du père Amel égorgé dans son église, du malien dans sa mosquée du Gard… ?) Elle tait le motif d’importation du conflit israélo-palestinien et la responsabilité israélienne dans le conflit. La mère de Merah avait été pourtant claire : « Je suis fière de ce que mon fils vient d’accomplir … les Arabes étaient nés pour détester les Juifs ».
Horvilleur déporte la responsabilité de cet antisémitisme communautaire sur son pays … « c’est une façon de ne pas vouloir voir en face qu’elle était la responsabilité de tout un chacun, la responsabilité nationale… » (NDA. Quel français se sent responsable du terrorisme anti-israélien ?) Un prêche suivi d’une prédication : « L’antisémitisme est le précurseur d’une violence plus large qui touche la société… on veut le limiter le contenir et ne pas voir ce qu’il dit d’une faille de la Nation… »
Bensaïd ; « Qu’est-ce que vous dites au gens qui disent c’est le problème des juifs ? »
Horvilleur ; « L'antisémitisme n'est pas le problème des juifs mais d'une nation, d’une famille d’un clan, d’une tribu, incapable de gérer une faille, une faillite, un manque » (NDA : les juifs ne feraient pas nation ? Quelle famille, clan, tribu ? Horvilleur laisse l’autre les trouver.)
Bensaïd : « Dans votre livre vous dites que l’antisémitisme pourrait avoir à voir avec la recherche d’une virilité masculine qui serait perdue, un problème d’identité masculine, on pense à Trump, Bolsonaro… »
Horvilleur : « oui c’est peut-être une difficulté à gérer la faille … » (???)
Psychanalysante, Horvilleur raconte avoir cherché dans l’histoire «. le lien permanent entre antisémitisme et misogynie, on a accusé les femmes et les juifs de la même chose, d’être hystériques, d’aimer l’argent, d’aimer le pouvoir, d’être lascifs… une quête d’identité complète qu’on associe au masculin ». La rabbine poursuivra avec des propos entendables peut-être dans une synagogue, pas pour qui attendait des éclaircissements.
Plus tard à Toulouse (23/11/2023) elle se reprendra ; « L’antisémitisme, ce n’est pas que le problème des Juifs », des juifs pour qui se serait aussi un problème ? Des mis en cause ? Avec ces extraits Horvilleur exprime toute sa difficulté à définir l’antisémite de tout le monde et personne.
Plutôt que d’accuser « sa » nation, Horvilleur n’aurait-elle pas dû parler du peuple français une notion qui englobe tous les français indifféremment de leurs origines et nous dire pourquoi la France est le deuxième pays au monde où il y a le plus de juifs ? Pourquoi les juifs préfèrent rester en France plutôt que de faire leur alyah ? Pourquoi ils conservent la double nationalité franco-israélienne quand ils vivent en Israël ? Pourquoi les juifs du Maghreb ont préféré venir en France plutôt que d’aller en Israël où on les attendait ?
…
En excluant les juifs du problème antisémite et donc de leurs responsabilités, sans jamais dire qui sont les antisémites et pourquoi, elle perpétue une posture victimaire et conforte l’opinion du député Chambrun (MRAP) qui déposait une loi contre le racisme et l’antisémitisme en 1969 et regrettait « … une trop grande exposition inutile de la victimisation des juifs. »
Avec les événements de Gaza l’antisémitisme polymorphe s’est enrichi d’une autre cause, anti-israélienne. En 2025 la rabbine Horvilleur a probablement trouvé à compléter sa réflexion, elle s’est honorée en dénonçant « la faillite morale d’Israël… la déroute politique… la faillite morale de l’Etat hébreu… appelle à un sursaut de conscience face à la tragédie endurée par les Gazaouis… Je me suis tue, mais, aujourd’hui, il me semble urgent de reprendre la parole… »
Qui l’accusera d’antisémitisme ?
A suivre.
Horvilleur et son interprétation ethnocentrée de textes religieux, écrit juif avec un J majuscule « ... parce que l'identité juive ne se laisse pas définir »